Avec une coopération de longue date très fructueuse avec la Chine dans la construction d'infrastructures, l'industrie manufacturière, l'agriculture et l'énergie, de plus en plus de voix se sont élevées parmi des dirigeants et des hommes d'affaires africains pour réclamer également une implication plus directe et plus soutenue des entreprises chinoises du secteur privé.
Lors d'un dialogue entre les dirigeants chinois et africains avec les chefs d'entreprise lundi à Beijing, peu avant l'ouverture du sommet du Forum sur la coopération sino-africaine (FCSA) dans la capitale chinoise, le président tchadien Idriss Déby a invité le secteur privé chinois à venir investir en Afrique via des transferts de technologie et la construction de davantage d'usines, les appelant "à saisir les opportunités de développement" sur le continent.
Interrogé par Xinhua avant son déplacement en Chine, le président guinéen Alpha Condé a dit espérer que ce nouveau rendez-vous du FCSA permette de se "concentrer cette fois-ci dans l'approfondissement des méthodologies et modalités de coopération, le renforcement des capacités de coopération et surtout au niveau des stratégies plus claires, impliquant le secteur privé chinois (...) et la présence plus grande des banques chinoises et des investisseurs chinois".
Il a ainsi estimé que l'Afrique doit redéfinir ses relations avec la Chine, notamment dans le domaine de l'informatique, où le géant asiatique a connu un succès fulgurant. En notant que les Africains sont friands des produits électroniques chinois, le chef de l'Etat guinéen plaide ainsi pour que des entreprises chinoises comme Huawei et Lenovo puissent produire leurs articles en Afrique. "Voilà un domaine dans lequel nous pouvons avoir des résultats spectaculaires", a-t-il lancé.
Des bras qu'ouvre également le Premier ministre libyen Fayez Sarraj. Les entreprises chinoises sont les bienvenues en Libye et le sommet du FCSA offre à ce titre une occasion de renforcer la coopération bilatérale, a-t-il dit à Xinhua.
En mai dernier, Dai Bing, directeur du département des affaires africaines au ministère chinois des Affaires étrangères, avait noté que davantage d'entreprises de son pays investissaient en Afrique, y créant de nombreux emplois pérennes comme par exemple le Parc industriel oriental en Ethiopie qui a fourni 11.000 emplois. Dans ce même pays, le fabricant de chaussures Huajian, qui travaille pour des marques comme Guess et Calvin Klein, a notamment créé des emplois directs pour plus de 8.000 personnes.
Dans un rapport de 2017 intitulé "La danse des lions et des dragons", l'institut McKinsey a recensé plus de 10.000 entreprises chinoises en Afrique, dont 90% sont privées, employant "plusieurs millions" d'Africains. Il est vrai que le gros des troupes se trouve pour l'essentiel en Ethiopie et en Afrique du Sud, devant le Kenya, le Nigeria et la Tanzanie, mais encore peu en Afrique de l'Ouest, avec notamment une forte représentation dans l'industrie manufacturière et les infrastructures.
L'institut de recherche prédit en tout cas que le chiffre d'affaires des entreprises chinoises pourrait atteindre les 250 milliards de dollars en 2025, contre 180 milliards aujourd'hui. Mais il ajoute que si la Chine investit hors de ses secteurs traditionnels et se lance résolument dans la bancassurance, le logement, les technologies de l'information et de la communication (TIC) ou encore le logement, ce chiffre pourrait même atteindre les 440 milliards.
Quelle que soit sa nature, publique ou privée, toute expertise est recherchée, a souligné le financier ivoirien Désiré Zakpa. "Nous ne sommes pas limités avec uniquement les entreprises d'Etat" chinoises, a confié à Xinhua le directeur général de Phoenix Capital Management, filiale du groupe financier Phoenix Africa Partners Holding (PAPH). "Nous cherchons justement à profiter de l'expertise qui existe ailleurs pour pouvoir permettre des réalisations avec un très bon rapport qualité/prix".
Wei Jianguo, ancien vice-ministre chinois du Commerce, a confié lors d'un récent séminaire organisé à Beijing par l'Université Renmin de Chine que, dans un avenir proche, les zones industrielles financées par la Chine couvriront l'ensemble du système industriel. Selon lui, la tech chinoise créera de nombreuses bases de développement en Afrique, des dizaines de centres de démonstration agricoles apporteront de grands changements à l'agriculture africaine et le secteur privé investira aussi sur le continent, notamment dans le domaine culturel.